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Ma Chine
La Chine, qui m’intriguait quand elle était de jade, d'encres et de porcelaines
« Les Chine(s)», devrais-je dire, tant elle a de visages:
Ses campagnes hors du temps, de torchis et de terre
Dont les tempêtes mongoles colorent chaque pierre,
Souvent trop loin, trop chères pour rentrer de l’usine
A part une fois par mois, desséchante routine.
Ses montagnes que surligne la muraille sans fin
Apportent l’eau précieuse aux plaines saturées.
Ses vestiges rescapés d’une «culture» sous tutelle,
Interpellent le regard, quels que soient les beaux-arts.
Par l’épure d’un palais, d’une calligraphie ou d’un fauteuil Ming,
Le dessin d’un jardin, la cambrure d’un toit.
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Beijing immobilier: centre, lac, voies privées,
Caméras vidéo en grappes, sécurité…
Un parfum de Neuilly, Bel Air ou bien Chelsea
Quiétude indispensable aux nouveaux gouvernants
Limousines vitres noires pour mandarins pressés,
Echo de la Cité Interdite d’antan.
Les places impériales désormais « populaires »,
Ont des révolutions tout l’air d’un rouleau…
Compresseur, comme le sont les idées fabriquées
Par les chaines de télé, plus efficaces qu’aux pieds.
Territoires "autonomes", dans un même registre,
Tel feu Pierre Desproges évoquant " « militaire »:
Mot qui proche d'un autre lui donne un sens contraire,
Par exemple, justice", dont on parle bien peu, sinon à mots couverts.
Shanghai, autre poumon, économique s’entend,
Superlatif pluriel si l’on devait en faire une conjugaison.
On l’apprend hors de prix pour ceux qui y habitent
Et qui courent derrière pour des jours meilleurs,
Sans temps pour leurs parents, ni pour eux-mêmes d’ailleurs.
Les jeunes, néanmoins, y sont "branchés", curieux :
Génération nouvelle, complice et policée,
Comme ne le suppose pas sa vie accélérée.
Elle s’inscrit en rupture de la brutalité qui domine malgré tout Sous la pression du nombre, des banlieues sans limites, Des épaules qui se fraient un chemin dans la foule, Des écoles sélectives dès les tous premiers âges, Des hommes en surnombre, ne trouvant pas d’épouse, De la malbouffe patente, du vieillissement latent, Symptômes annonciateurs de multiples naufrages.
Partout, couples et âmes seules, abonnés aux selfies
S’improvisent souriants pour une galerie virtuelle :
Soumission au présent, hypertrophie du moi
Pour exister aux yeux du milliard, virgule trois,
Ou juste un jeu léger dans une vie trop cadrée ?
Ma Chine qui navigue entre caps opposés
Histoire à préserver, traditions familiales, superstitions de mise,
Socialisme planifié, consumérisme forcé;
Les premiers semblent céder sous le poids des seconds
Lesquels font abstraction du sens, de la pensée
Trop obsédés qu’ils sont à vouloir programmer
Le moindre comportement, et le canaliser.
Témoins s’il le fallait, ironie tout au moins :
Les billets à la gloire d'un joufflu président
Pour une économie de marché assumée,
Un polymorphe empire en pleine renaissance,
Prêt à tout sacrifice pour mieux mener la danse.
Ma Chine à l’appétit gargantuesque de terres,De riz, d’air pur, d’eau fraîche… voire d’anciennes frontières
Ainsi ses excédents, notamment monétaires
Attirent les ennemis qui de loin la fustigent
Mais de près la séduisent, pour un point de croissance
Ou un contrat de plus et moins d’indépendance
Venu à reculons, je l’avais abordée en passage obligé,
J’en repars perplexe, surpris, impressionné.
Je ne peux m’empêcher de penser néanmoins
Aux anciens dont on sait ce dont ils furent témoins:
Sereins en apparence dans un monde bouleversé,
Pour qui l’accomplissement de l'ensemble d'une vie
N’est pas frappé d'un sceau Chanel ou Ferrari,
Mais dont la force inonde un parc centenaire
D’un air d’opéra, d’un mouvement de tai-chi.
J’en termine sur l’espoir que la génération égo-boulot-dodo
Arrive au bout d’un cycle de contre-vérités,
Dont elle ne sortirait qu’instrumentalisée
Et mette au rebus le vieux marionnettiste
Pour obtenir des urnes la plus belle utopie.
François
Our experience of China was limited to work this far, but we knew so little of the country before this trip. Not that you can figure out China in a month, yet slowly but surely, it grew on us.
Rest assured, we were moderatly seduced by its modus operandi, the pervasive presence of its “ultra-caring” government, behind the web, behind the thousands of cameras that can follow your every step, in any costume, purposefully military, or just as purposefully anonymous. Not that invisible yet ever so powerful China.
We fell for China's spectacular heritage, across all fine arts, from architecture to furniture, paintings, calligraphy, wood carvings, modern-art at times. We fell for its people: hard working from a young age, under constant social pressure (enhanced by the single child policy recently made a little more flexible), yet welcoming, cheerful, courteous when everything around them seems rugged, devoted to growth alone.
Humor again, and poetry, suddenly strike in an art gallery or the unexpected corners of a park, together with tai-chi movements, evoking ancient wisdom. The energy of the above seems very remote for minorities, homeless families at the heart of the country’s main strain station, miners or farmers, or people packed in the ever-growing subway system as they get from their empty buildings to a vacation-free job.
We fell for its nature… when painted on... china, but could not escape pollution.
We see it gain force, aspiring to be the empire it once was, successfully so, but we would like to imagine it can grow in other ways, liberating the minds and talents of the many... for its own good if it cannot find a better reason. Just like the "Hundred Flowers" campaign, but genuinely this time.
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Commentaires
2NicoVendredi 1er Mai 2015 à 20:11Jo a magniquement decrit une impression que je partage; Francois: j'ai bien trouve les quelques perles dans ton texte...a se courber l'echine sur le rouleau imperial
3MarieSamedi 2 Mai 2015 à 00:154bastieSamedi 2 Mai 2015 à 13:30Tres juste commentaire sur cette chine nouvelle, sans valeurs, desincarnee, materialiste et sans liberte de pensee malgre cette liberte de depnser. J'etais bleufer, meme chez MS de voir l'absence totale de debat politique (a part sur Taiwan...), le respect aveugle du "chairman Mao" et la fascination pour le fric pas chic.Bon voyage au Boutan, pays qui semble avoir pris une direction bien differente.
Merci Mam, Nicolas, Marie, Laurent pour vos mots en retour, généreux et sans langue de bois. Nous venons d'arriver au Bouthan, effectivement à 180 degrés de la Chine. Le charme a déjà commencé à opérer. Aucun dégât sismique ici malgré la proximité du Népal.
6SophieSamedi 2 Mai 2015 à 15:09Superbes mots François, comme toujours. Ce visage ridé est sublime Fabienne. J'aurais aimé un peu de couleurs mais ce n'est que mon jumble avis... Continuez les amis7MarielleSamedi 2 Mai 2015 à 20:09Beautiful country! And what a grear pictures again! Enjoy your last leg of the journey and we will see you in Brussels after summer! Bisous a tous!
8pierreDimanche 3 Mai 2015 à 09:43Je me joins sans barguigner aux commentaires sur "Ma Chine".
Reportage superbe et édifiant, mais pas très optimiste…
Oui, faut absolument faire un album.
Bizàvous4
9NatDimanche 3 Mai 2015 à 21:23Ma Fabienne, je voulais aussi te dire que tu es de plus en plus belle sur toutes ces photos. ce voyage te rajeunit, vous rajeunit toi et François... Les enfants murissent et rayonnent de plus en plus eux aussi. C'est drôle les transformations au fil du voyage ! Baisers à tous les 4
Merci ma Nath, mais c'est parce que c'est moi qui choisis les photos...!
Merci Pierre, Marielle, Sophie, on adore partager tout ça avec vous. Plus qu'un mois....ça passe si vite !
On vous embrasse
11carotonyMardi 5 Mai 2015 à 05:59Francois a deja tout dit, alors que dire d autre a part que c est magnifique, photos et poésie!!! Bravo a tous les 4
12CorinneMercredi 6 Mai 2015 à 09:09Bonjour à vous 4,
C'est toujours un immense plaisir de consulter votre blog, de voir de si belles image et de lire de si beaux mots. Merci encore de partager cette aventure avec nous tous et de nous faire évader de notre quotidien.
Espérons que cette nouvelle génération sorte de ses multiples carcans pour fonder un monde plus humain. J'ai hate de lire vos impressions sur le Bouthan aux antipodes de ce modèle dépersonnalisé !
J'ai été stupéfaite de constater combien Gabriel et Adélaïde avaient grandi en quelques mois ! L'effet du grand air, de la découverte et du bonheur peut être ?
Profitez bien de ces semaines à venir, nous aurons plaisir à vous retrouver en Europe puisque notre aventure américaine se termine et que nous rentrons dans l'Ouest parisien début Juillet.
Bises et à bientôt,
Corinne
13JulietteJeudi 21 Mai 2015 à 02:25Lire un poème de francois est plus envoûtant qu ouvrir un livre de méditations de Christophe André ... J ai vraiment hâte de vous retrouver ts les 4 apres cette annee révolutionnaire pour vous comme pr moi. Je vs embrasse
14jplMercredi 27 Mai 2015 à 18:0015gosset cecileDimanche 31 Mai 2015 à 22:16Bravo à Francois
je me remets sur votre blog après une longue absence et je mesure tout ce que j'ai raté , je me précipite de ce pas au bhoutan et en grèce , biz à tous les 4 Cécile
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L'illustration accompagnant toujours si bien le texte .
Vos talents conjugués méritent une reliure .
A envisager sérieusement...
Merci pour ce moment marquant .
Plein de baisers ,
mütti/mam